Le vote Front National apparaît souvent comme un vote contestataire, anti-système, condamnant les politiques qui portent la responsabilité de la situation (ce que le FN appelle le « système UMPS »). Un vote qui se retrouve dans les couches populaires mais aussi chez les jeunes (19% d’après les sondages !), une nouveauté avec la candidature de Marine Le Pen. À tous ceux-là, il faut montrer ce qu’est le programme du Front national.

Un programme antisocial

Le chômage touche 23% des actifs chez les 15-24 ans. Plus de la moitié des étudiants travaille pour financer ses études, le plus souvent au black ou dans des jobs précaires. Dans la brochure-programme de MLP, on ne trouve pourtant pas un mot sur la précarité, les conditions de travail ou les licenciements. Une seule fois les mots « chômage » et « délocalisation »… Mais seulement pour s’en prendre à l’euro ! La voilà donc qui défendrait la retraite à 60 ans… Alors qu’avant les grèves et manifestations massives pour la défendre, en 2010, le FN était encore pour le départ à 65 ans ! Il s’est empressé de retirer cela de son programme. Mais il n’en soutient pas moins l’obligation de cotiser quarante ans : qui d’entre nous pourra donc commencer à travailler à 20 ans, sans galère ni période de chômage, pour cotiser quarante ans et partir à 60 ? C’est une escroquerie. À moins de nous mettre au travail dès l’enfance ? Justement, MLP propose de « rétablir l’apprentissage à 14 ans » !

Dans ce volet « social », elle parle d’augmenter les salaires de 200 euros, mais seulement jusqu’à 1,4 fois le SMIC, et en remplaçant les cotisations sociales patronales par une taxe de 3% sur les importations. C’est donc un cadeau aux patrons, qui prive la Sécu de rentrées d’argent. C’est aussi une absurdité : aucune entreprise, aussi française soit-elle, ne peut produire en vase clos, sans importer une partie ou toutes ses matières premières. Aujourd’hui et de tout temps, les augmentations des salaires sont arrachées dans les luttes ! La grève générale de 68 avait permis d’arracher 10% d’augmentation moyenne, 35% pour le SMIC ! Ne comptons pas sur le FN : ce n’est pas contre les patrons qu’il se bat, mais contre le droit de grève et les syndicats. Il n’est jamais là dans les luttes sociales ! Depuis toujours opposé aux 35h, le FN s’est bien gardé de le clamer lors de cette campagne électorale, il a évoqué seulement une « renégociation ».

Le FN et l’école

Le programme titre « méritocratie et discipline » ! Puis on lit : « l’école sera recentrée sur la transmission des savoirs fondamentaux : lire, écrire, compter » ! Un enseignement ludique, comprendre le monde, se forger un esprit critique ? Inutile pour se faire exploiter dès 14 ans ! Mais la discipline, elle, est utile : les exploités ont tendance à se révolter. Le FN qui veut diminuer les effectifs dans les services publics (et donc dans l’Éducation), propose de les augmenter seulement pour la police, les prisons, la justice et l’armée. Travaille et tais-toi !

Un parti raciste

Viande halal, burqa ou autres, leur « non à l’islamisme » et leurs appels récents au respect de la laïcité ne sont que le nouvel habillage du vieux fond raciste et islamophobe. « Tout financement par les collectivités locales de lieux de culte sera interdit », mais il faut revaloriser le « patrimoine rural (églises ou autres) ». Il y aurait donc de bonnes églises… Et de mauvaises mosquées, responsables de l’« infiltration d’une idéologie politico-religieuse » à l’aide « de l’argent provenant de pays étrangers » ! Et si on parlait du Vatican, riche paradis fiscal, en croisade politico-religieuse contre le préservatif et le droit à l’avortement ?

« Stopper l’immigration et instaurer la priorité nationale pour l’emploi, le logement et les aides sociales » : l’immigré devient responsable de tous les maux : chômage, crise du logement, déficit de l’État et de la Sécurité sociale. En réalité, il s’agit pour la plupart de salarié-e-s qui paient des impôts et des cotisations sociales, consomment, participent à la vie sociale. Non, l’immigration n’aggrave pas le chômage. Les immigré-e-s sont les premières victimes de la précarité, du chômage et de la dégradation des conditions de travail. À chaque crise, la main d’œuvre étrangère joue le rôle d’amortisseur. Dans les années 80, dans l’automobile ou le bâtiment, un ouvrier viré sur deux était étranger. En quinze ans, de 1975 à 1990, 40% des postes de travail occupés par des étrangers dans l’industrie ont été supprimés, soit plus de 500 000 salariés. Les travailleurs immigrés ont servi de cobayes aux politiques de flexibilisation de la main d’œuvre. Celles-ci ont ensuite été étendues, aux jeunes et aux femmes notamment. Nés ici ou là-bas, naturalisés ou pas, nous avons donc les mêmes intérêts. Les responsables de la crise, du chômage, des bas salaires ce sont ceux qui nous exploitent, quel que soit notre statut. N’en déplaise à MLP, personne n’émigre pour le plaisir. L’essentiel des migrations de masse résulte de guerres ou d’effondrements politiques. Les immigrant-e-s fuient les conditions d’existence déplorables entretenues par les dictatures dans les ex-colonies françaises, avec le soutien des gouvernements en place à Paris, de droite comme de gauche.

Pour le FN, le temps des colonies n’est pas révolu ! Car s’il ne veut pas « accueillir toute la misère du monde », il voudrait bien s’accaparer toute la richesse du monde : dans sa « vision stratégique pour l’Outre-mer », il rappelle que « l’exploitation des richesses sera favorisée, qu’elle soit pétrolière ou aurifère en Guyane ou encore liée au nickel en Nouvelle-Calédonie ».

Le FN est sexiste et homophobe

D’ailleurs t’en penses quoi, Marine Le Pen, du droit à l’avortement ?

« Le libre choix pour les femmes doit pouvoir être aussi celui de ne pas avorter ». Comme si les femmes avortaient sous la contrainte ! Donc rien sur les fermetures de centres d’IVG ou les suppressions de subventions au planning familial, qui remettent en cause le droit des femmes à disposer de leur corps. C’est que les femmes doivent enfanter et rester à la maison : elles ne sont qu’un ventre au service de sa « politique nataliste ». Elles seraient gratifiées d’un « revenu parental, équivalant à 80 % du SMIC » pour pouvoir « se consacrer à temps complet à l’éducation de leurs enfants ».

C’est par l’accès au travail que les femmes ont gagné de l’indépendance, et se sont dégagées de la tutelle du père ou du mari. Papa travaille, maman fait à manger, c’est la merveilleuse famille, « institution irremplaçable, cellule de base de la société ». Pas un mot sur les violences subies par nombre d’entre nous au sein de la famille, sur celles et ceux qui se retrouvent exclu-e-s pour avoir choisi un projet de vie ou professionnel, pour vouloir assumer leur sexualité, en opposition aux schémas de leurs parents. Pour le FN, la famille « doit se fonder exclusivement sur l’union d’un homme et d’une femme en vue d’accueillir des enfants nés d’un père et d’une mère ».

Évidemment, MLP s’oppose « à toute demande de création d’un mariage homosexuel et/ou d’une adoption par des couples homosexuels », et ajoute que « le PACS apporte une solution suffisante ». Elle refuse donc le droit aux couples homosexuels de construire un projet de vie au même titre que les couples hétérosexuels. Elle nie l’existence des familles homoparentales. Quid de la responsabilité des deux parents vis-à-vis de l’enfant ? De leur statut juridique en cas de séparation, ou de décès du ou de la conjoint-e ? Une injustice qui aboutit à des situations dramatiques.

Sans l’ombre d’un doute, le FN est notre ennemi. Nous serons de tous les combats antiracistes, féministe, antisexiste, pour la défense des libertés fondamentales, de l’Éducation, de toutes les sexualités, mais aussi contre le chômage et les licenciements, afin de faire barrage à ses idées rétrogrades.

Rafa, NPA de Rouen.